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Malcie on ze Blog
23 juillet 2008

Circus

C’est l’histoire d’une fille qui va au cirque. Qui ouvre grand les yeux et se régale des décors peints, des guirlandes de loupiotes, du velours rouge et des franges. Planquée au milieu du public,  elle a plié son blouson pour se faire un petit coussin confortable pour son cul-cul, allongé les jambes et elle soupire un p’tit peu en regardant partout autour d’elle.

Quand le spectacle commence elle fait comme les autres, enfin, elle rit moins fort, elle pouffe juste un peu. Y a bien des fois où elle rigole très fort, mais là non. C’est pas que ce soit pas bien mais quand ça fait trop de bruit devant, elle entre pas en concurrence. Peut être finalement que ce qu’elle aime c’est entendre son rire fuser seul au milieu du silence.

Sur scène, c’est l’histoire d’un restaurant, une pizzéria un peu foutraque. Et quand le serveur passe dans les rangs pour choisir les convives qui monteront sur scène, elle ne se méfie pas, enfin si, un peu quand même, elle évite de croiser le regard du type qui cherche « una ragazza ». Les yeux noirs, ça risquerait le tenter.

Quand il lui tend la main pour l’inviter à le rejoindre elle y va, confiante, quelques minutes au bord de la scène c’est pas bien méchant. Le type presqu’à côté monte aussi, et puis une autre fille, choisie par le marmiton. Y a deux comédiens, un marmiton maladroit, en habit de marmiton et toque blanche un peu écrabouillée, et un serveur plutôt sexy, queue de cheval, anneau à l’oreille, barbe 3 jours, petit gilet et chaussures pointues. Ils se disputent, chacun veut sa cliente. La candidate du marmiton semble l’emporter, celle du serveur – la fille qui va au cirque, l’héroïne de l’histoire – commence à souffler et entame un retour en direction de sa place, l’air de rien. Elle se rassoie tranquillement. Ah zut, le frérot aux godasses de mafieux vient la récupérer, c’est lui qui a gagné finalement. Retour à la case départ.

Bienvenue chez les fous. Le mafioso installe le couple à table, au centre de la scène. Nappe à carreaux et petite bougie le spectacle commence, ça parait finalement très mal barré pour que ça ne dure que cinq minutes. La fille se dandine sur sa chaise, elle tire sur son pull, putain de taille basse. Elle vérifie discrétos les cheveux, le collier, elle croise les jambes, puis les bras. Elle sait pas trop comment se mettre Elle se demande si elle transpire pas au moins, le type en face d’elle ruisselle littéralement, sous les projecteurs. On voit bien qu’elle essaye de tourner le dos au maximum au public qui n’a que ça à faire de mater comment les deux crétins montés sur scène vont se débrouiller. Elle se sent pas trop bien, avec l’impression d’avoir un sourire botox vissé sur les lèvres, la sensation d’être très rouge et le regard un peu traqué.

Derrière, les deux lascars virevoltent, grimacent, lui font des misères tout en jonglant avec la pate à pizza, les assiettes, les nappes. Elle ne se souvient plus très bien de ce qu’ils font, ça tourne un peu, elle est concentrée sur ce regard unique, cet œil du cyclope du public qu’elle sent peser dans son dos, les rires, les applaudissements, les sifflets.

Enfin c’est l’épilogue. Le serveur pose une bouteille de vin devant le type qui a joué avec elle, et elle se dit que c’est sympa, ça lui aurait bien plu la bouteille avec la tronche des deux frérots dessus, en souvenir. Puis c’est au tour de la fille recalée, dans le public, de se voir offrir une rose rouge. Tiens ben elle s’en fout, elle aime pas les roses toutes seules, toutes raides, comme ça, mais elle a petit pincement. Jouer les mal aimées, les détestées, pendant une heure, comme ça, y a des vieux trucs pas nets qui remontent, bon, c’est qu’un jeu mais quand même.

Et là… Le pizzaiolo fou déboule avec un bouquet énorme, énorme, vraiment, un bouquet comme elle en a jamais eu. Un bouquet comme ceux qu’on offre aux artistes sur scène, et elle, elle se dit que parti comme c’est, il va le lui passer sous le nez et l’offrir à quelqu’un d’autre. Vraiment elle pense ça.

Et non, il le lui tend, elle hésite, elle le prend. C’est lourd, c’est émouvant finalement comme geste. Et il la prend dans ses bras, le méchant jeu est fini, on le voit dans ses yeux, même s’il fait ça tous les soirs avec un spectateur différent, chaque moment est unique. Elle est vachement émue, c’est tout con, se retrouver face à des gens qui applaudissent, un bouquet à la main, c’est émouvant. Plus tard, à la sortie, tout le monde lui sourira, la reconnaitra, lui dira bravo, c’était bien mérité, il vous en a fait, j’aurais pas aimé être à votre place. Elle est toute retournée.
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Commentaires
G
voilà, je me doutais que c'étais toi mais tu as su faire entretenir le suspens donc je dis chouette
Malcie on ze Blog
  • Quand les tapas arrachent, que les olives piquent un chouille, que les pikkles sont -aillaillaille- très acides, et que les petits fours ont des dents, c'est le grand mezzé de Malcie on Ze Blog.
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