LOST IN THALASSO | EPISODE III
Je continue le couloir jusqu'à l'espace hydro marin...une piscine à jets, ambiance blanche façon salle de soins, banquettes bouillonnantes machin bidule dans laquelle barbotent quelques têtes en bonnet latex rouge et blanc, l'air perplexe et désoeuvré. Je me rends compte que tout est blanc, les chaises en plastique, les peignoirs, les murs, le carrelage, la peau des curistes. Je me souviens alors que j’ai horreur du blanc. Trop tard.
Malgré les panonceaux annonçant une eau à 31°, la piscine me tente assez moyennement… les gens qui baignent dedans ont l’air de se demander ce qu’ils font là, et moi un peu pareil déjà. Aussi je continue la promenade jusqu'à "la rivière aux galets" dont le titre m'émoustille un peu, m'imaginant une sorte de descente de canyon ludique, toboggans et glissades...J'arrive donc à la rivière, un parcours rectangulaire en carrelage bleu canard, grand comme deux jacuzzis, décoré par deux plantes en plastique symbolisant la jungle luxuriante, tournant autour d'une main courante en inox. Une curiste blonde tourne à l’intérieur du parcours de bon cœur, et m'accueille avec un sourire en me proposant de la rejoindre, sous le prétexte que c'est plus drôle à deux. Je suis toute prête à la croire, en léger manque de communication, j'avais à peine ouvert la bouche depuis la veille au soir, je lui demande donc en croassant si c'était pas trop chaud, et là elle me dit :
- « Ah bé non, hein, c'est tonifiant, elle est à 14° »
Un blanc se fait dans ma tête. Quatorze degrés.
Alors que j’avais ignoré le bassin à 31°, quelqu’un peut-il m’expliquer pourquoi je me retrouve en train d’arpenter la rivière aux galets (tout de suite trois mètres de long, mais avec le retour de l'autre côté, ça fait une grande promenade de six mètres) me bousillant la plante des pieds sur des galets de travers, dans de l'eau glacée, derrière une blonde probablement dépressive... Il faut rester au moins un quart d'heure (tous les jours pendant trois mois) pour que ce soit efficace...de toute façon, au bout de deux à trois minutes, les jambes (l'eau s'arrête au ras du maillot) sont devenues complètement insensibles...La blonde me fait changer de sens de temps en temps, "pour varier" ...en effet, ça change assez notablement...
Une grande solidarité m'envahit, envers les pingouins, otaries et phoques des musées océanographiques de France...la blonde, pourtant, accomplit cet acte répétitif, et très probablement expiatoire, je ne vois pas d'autres raisons, quotidiennement depuis le début de son séjour...
Au bout de dix minutes, je sors du bain avec un sourire d'excuse, j'en ai ras le bol de tourner et je suis complètement frigorifiée...elle incline la tête dans un sourire de geisha... J'ai appris qu'elle accompagnait une amie qui, comme moi, avait reçu une cure en cadeau d’anniversaire, une semaine pour elle, deux jours pour moi...je me félicite intérieurement d’avoir invité trop peu d’amis pour qu’ils réunissent de quoi payer une semaine...
(à suivre)